Régis Debray
«Les biographies m'emmerdent!»
Né en 1940 à Paris dans un milieu bourgeois, Régis Debray rechigne à parler de lui à l’oral. Il n’a rien à dire sur son enfance et sa vie, annonce-t-il, a commencé à l’âge de 16 ans. Au cours de ces mémoires improvisées, il s’attarde sur sa jeunesse révolutionnaire en Bolivie, où il fut fait prisonnier, et revient sur son rôle de conseiller diplomatique de François Mitterrand. Durant cette confession spontanée, il s’évertue à ne pas enjoliver son passé. Il évoque ses enthousiasmes, et ce qu’il appelle ses bévues. « Les idées, quoi qu’on en dise, ce sont celles d’une époque, c’est très rare qu’elles nous appartiennent », avoue-t-il.
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«National-républicain : je vote!»
L’expression avait fait florès en 1999, dans une plaquette titrée « Le code et le glaive », dans laquelle Régis Debray faisait son examen de conscience d’un républicain. Il insiste, aujourd’hui, vingt ans après, sur l’importance du trait d’union. Car la Nation, c’est d’abord la fable, le cri de Valmy, en 1791, une idée de gauche, qui s’est dégradée. Mais, c’est également, l’émancipation par l’École. Dans les années 1970, elle était donnée pour morte. Or la mondialisation a créé un tel vide, qu’elle a entrainé selon Debray, « une balkanisation politico-culturelle », sans pareil. « La mondialisation a stimulé la Nation ». Pas toujours dans la bonne direction !
Régis Debray
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«Aucune société ne peut se passer du sacré»
Régis Debray est amer. « C’est le grand échec de ma vie intellectuelle », commence-t-il par affirmer. On le comprend, lui qui a publié un des plus beaux livres sur ce que ce mot recouvre : « Jeunesse du sacré » (2012). Le sacré, c’est « ce qui interdit le sacrilège et justifie le sacrifice », dit-il. Il n’est donc pas d’essence religieuse. Il n’est pas que divin. Loin s’en faut ! Dans la crypte du Mont Valérien, le cœur se serre. Devant le mausolée de Lénine, on ne fume pas un cigarillo. À La Mecque, on ne chante pas du rock. Sous l’Arc de Triomphe, on ne pisse pas sur la tombe du Soldat Inconnu. On se tient. C’est cela un lieu sacré. Un lieu qui vous impose une limite, un espace qui « est soustrait aux rapports marchands ». S’il est une leçon à retenir, c’est celle-ci : aucune société ne peut se passer du sacré.
Régis Debray
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«Et si on devenait américain!»
Comme la nation, la civilisation est un mot-valise. Ce qui pose problème avec ce vocable, c’est le passage du singulier au pluriel qui s’opère aux alentours de 1850. La civilisation, cela désigne le progrès au sens large. Les civilisations, cela désigne un ici et un là-bas. Un éclatement dans l’espace. L’idée, tout simplement, qu’il existe plusieurs civilisations. Et pas une seule ! Or on sait depuis Paul Valéry que les civilisations sont mortelles. On le savait avant, mais en 1919 l’Amérique était pour lui une projection de l’Europe. Tandis que de nos jours l’Europe est une projection de l’Amérique. Et qu’il est incongru de parler de civilisation française. Tant le désir d’être américain, selon Debray, est prégnant dans notre pays.
Régis Debray
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