« L’homme peut, le sujet peut, le patient peut ». C’est par cet axiome moral que Cynthia Fleury ouvre son livre Ci-gît l’amer. Guérir du ressentiment (2020). Contre l’aigreur, la rumination, la plainte, elle plaide ici pour un humanisme du rire et le risque de penser. Elle propose des antidotes à tout ce qui porte atteinte au discernement et empêche le sujet d’accéder à l’humilité et la sublimation. Une belle leçon.
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«Le smartphone est notre nouveau vêtement»
Aujourd’hui, tout est réseau. Ce que l’on prend pour une nouveauté n’est que la reprise d’une ancienne utopie technologique imaginée par les ingénieurs saint-simoniens au début du XIXe siècle. Mais il faut remonter encore plus loin afin de cerner la notion. Se faire géologue et exhumer toutes les couches de sédimentation qui ont favorisé son émergence. De l’antiquité à nos jours. Du côté de la médecine, de la philosophie, de l’ingénierie. Comment l’idéologie du réseau a fini par s’imposer ? Pierre Musso, dans un exposé magistral, lève le voile.
«On fera avec ce qu’il reste»
Des ruptures, nous en traversons tous. Amoureuses, professionnelles, familiales, etc. Mais à l’inverse d’un simple éloignement, la rupture, voulue ou choisie, est toujours un déchirement. Elle doit composer avec la perte. Car la rupture, comme la maladie, ne recouvre l’état antérieur, qui la précède. Elle nous modifie ; elle nous fait changer. Claire Marin analyse le phénomène de la rupture sur tous les plans, y compris celui de la politique, dans un monde où la permanence est l’exception, la rupture, la règle. Elle tente de faire face à tous ces bouleversements.
«Oeuvrer à son échelle à des réparations»
Des réparations de l’Histoire à celles du corps, en passant par celles de la Terre, Claire Marin, explore un nouveau concept dans le champ philosophique : la réparation. Tout est-il réparable ? La résilience est-elle toujours possible. Non, rétorque la philosophe d’entrée de jeu, mais il existe des processus de réconciliation, des moyens de faire face à l’irréparable. Effort difficile, lourd, incertain, mais qu’il faut pouvoir affronter pour ne pas sombrer dans le désespoir. Une leçon de résistance, pour nos temps troublés.
«Pourquoi refoule-t-on la religion ?»
Au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo, Jean Birnbaum constate le déni du religieux, particulièrement dans les milieux progressistes où la religion n’est jamais que le voile du social. Pourtant, il y a un retour violent du théologico-politique qui se présente comme le visage même du réel. Suivant les pas de Michel Foucault en Iran, l’essayiste réhabilite la mémoire perdue de la religion en tant qu’elle touche au corps et au symbolique.
«L’homogénéité est une idée totalitaire»
Être sociologue et universaliste paraît de prime abord contradictoire. Pourtant, c’est bien ce qu’entend réconcilier Dominique Schnapper. Si la question sociologique par excellence est celle du collectif, du vivre ensemble, c’est-à-dire comment vit-on avec les autres, elle pose le problème de l’universel et du particulier. Pour la sociologue, il faut être à la fois sensible à la diversité culturelle, au poid de l’histoire, tout en respectant un espace public commun neutre et ne pas transiger sur la séparation du politique et du religieux.